Architecture et patrimoine CMAQ
Tailler l'avenir pour mieux restaurer la mémoire collective
Contribuer aux besoins de la communauté à travers la spécialisation en taille de pierre
Ardoise, tôle, vitraux, pierres ... Tant de matières qui ont besoin d'amour pour préserver l'identité des communautés, l'essence de nos villes et de nos quartiers. Immeubles commerciaux, hôpitaux, bungalows, bibliothèques ou encore fresques pour n'en nommer que quelques-uns, au Québec, de nombreux témoins symboliques d'époques passées sont négligés. Pour lutter contre leur dégradation, il va de soi de s'outiller afin de préserver cette beauté.
Découvrez ici les coulisses de tout ce qu'implique le travail engagé de la conservation du patrimoine bâti, dont l'exécution est aujourd’hui enseignée dans un programme reconnu. Ça tombe à point, car les besoins de restauration du patrimoine bâti sont grandissants au Québec. Pour former les personnes capables d’intervenir dans ce domaine, le Cégep du Vieux Montréal et le CMAQ ont choisi une approche tournée vers les besoins de la communauté.
Comment concilier les grands besoins de restauration du patrimoine avec les enjeux de formation de la relève ?
La première cohorte de l’AEC en Métiers d’art du patrimoine bâti a été un terrain fertile pour mettre sur pied un projet unique de collaboration.
Pour la spécialisation en taille de pierre, le défi était grand, pour ne pas dire de taille. Après avoir participé aux cours théoriques du programme, qui incluent le dessin technique appliqué au patrimoine et la caractérisation des bâtiments, il était important de trouver des projets réels pouvant être réalisés en atelier, dans une durée de temps limitée et qui présentaient les aspects techniques enseignés dans la formation. Voyez ci-bas le travail effectué sur le site de l’ancien hôpital Royal Victoria et de l’Institut Allan Memorial.
L’ensemble patrimonial du site de l’ancien hôpital Royal Victoria
Le site de l’ancien hôpital Royal Victoria et de l’Institut Allan Memorial s’étend sur le flanc sud du Mont-Royal, à l’angle de l’avenue des Pins Ouest et de la rue University. Il occupe une superficie d’environ 13 hectares, soit 18 terrains de football. Son développement a débuté en 1863 avec la construction des premiers bâtiments de la Villa Ravenscrag de Sir Hugh Allan. Ces bâtiments seront légués en 1940 à l’hôpital Royal Victoria pour en faire le premier institut universitaire de santé mentale en Amérique du Nord, l’Institut Allan Memorial.
Il faut dire que le site et ses nombreux bâtiments sont d’une qualité exceptionnelle. La restauration et la réhabilitation seront nécessaires pour l’ensemble des bâtiments, que ce soit pour les éléments de pierres extérieures, les portes et fenêtres anciennes, les décors peints, les éléments de plâtre, les toitures, l’enceinte et les portails d’entrées.
Laissé en grande partie vacant après la migration des activités du Centre universitaire de santé McGill vers le site Glen, l'ensemble du site est en voie d’être acquise par la Société québécoise des infrastructures (SQI), qui travaille actuellement à mettre sur pied son Plan directeur pour l’aménagement du futur site.
Bijou architectural du site du Royal-Victoria : l'écurie de la villa Ravenscrag
La Villa Ravenscrag et son écurie ont été construites entre 1861 et 1863 pour y loger Sir Hugh Allan, riche propriétaire de l’empire maritime privé le Allan Shipping Line, puis son fils Hugh Montagu Allan, jusqu’à ce que la propriété devienne partie intégrante de l’hôpital Royal Victoria en 1940.
La façade du bâtiment est en pierres grises de Montréal richement ornée. On remarque entre autres la porte cochère à arc plein cintre surmonté d’une magnifique clé de voûte en forme de tête de cheval. Difficile de passer inaperçu ! Chaque côté de la porte est aussi orné d’admirables médaillons sculptés.
À travers l’AEC en Métiers d’art du patrimoine bâti, un point d’honneur est mis à la documentation exhaustive de projets patrimoniaux. C’est pourquoi les étudiants ont fait plusieurs visites du site et ont eu l’occasion d’échanger avec les propriétaires afin de bien comprendre les besoins et les enjeux du site, prendre des photographies et effectuer les relevés des mesures exactes des éléments à reproduire.
La reproduction de jambages en pierre
Le premier projet réalisé par les étudiants est la reproduction de jambages en pierre de la porte d’entrée de l’écurie. Sur le site, on constate que la pierre des jambages est actuellement endommagée notamment par l’usage du sel en hiver. Ce type de dégradation est assez commun sur les bâtiments en pierre au Québec. Plusieurs interventions sont alors possibles pour corriger la situation. Dans le cas des jambages, la reproduction des pièces a été proposée comme solution afin de remplacer la pierre dégradée.
Après avoir faits les relevés sur les pierres d’origine, les étudiants ont entrepris le travail en atelier sur des blocs de pierres calcaires provenant de la carrière Saint-Jacques, la pierre qui se rapproche le plus du matériau d’origine. Plus de 90 heures par étudiant ont été nécessaires pour reproduire les pierres de jambage.
La reproduction des sphères ornementales
En marchant aux abords du site de l’ancien hôpital, on remarque une enceinte de pierres ornée de piliers sur lesquels reposent de grandes sphères de pierres sculptées en un seul bloc. On peut constater que plusieurs des sphères se sont détériorées avec le temps. Certaines sont manquantes, d’autres sont fissurées et plusieurs ont perdu leur fini d’origine.
Les étudiants ont fait le relevé des mesures des sphères sur le site afin de produire ce qu’on appelle en architecture une épure, c’est-à-dire un dessin aux dimensions réelles de l’ouvrage à réaliser. Petit fait cocasse, comme ces sphères étaient réalisées à la main à l’époque, aucune des sphères n’a les mêmes dimensions!
En atelier, les étudiants ont réalisé les dessins techniques, planifié les étapes de travail, constitué un dossier de documentation étoffé sur l’ouvrage, puis tailler leur pièce à même les blocs de calcaire.
Chaque sphère représente aussi environ 90 heures de travail! Le résultat final des étudiants a été évalué par un jury composé des représentants de la SQI, d’un artisan tailleur de pierre, d’une restauratrice du Centre de conservation du Québec ainsi que d’une architecte du ministère de la Culture et des Communications du Québec.
Les pièces réalisées ont été jugées recevables et pourront être installées éventuellement sur le site. Un bel accomplissement qui remplit de fierté nos diplômés! L’ensemble de cette démarche démontre bien qu’il est possible d’enseigner des techniques de métiers tout en contribuant à restaurer des éléments du patrimoine bâti québécois.
À votre tour, ressentez toute la fierté de restaurer un morceau d’histoire. Saisissez les occasions d’affaires qui se multiplient avec l’intérêt grandissant envers le patrimoine. Ralliez-vous à une communauté de gens engagés en vous inscrivant au AEC pour vous perfectionner en métiers d’art du patrimoine bâti.
À propos de l’AEC
La nouvelle attestation d’études collégiales (AEC) en Métiers d’art du patrimoine bâti permet de se perfectionner pour intervenir adéquatement sur les bâtiments patrimoniaux. Ce programme de 510 heures comprend des cours communs à tous les métiers et des cours techniques en atelier selon les spécialisations.
Neuf spécialisations seront développées : arts décoratifs, charpenterie traditionnelle, ébénisterie-menuiserie, ferblanterie ornementale traditionnelle, ferronnerie d’art/forge, maçonnerie traditionnelle, plâtre ornemental, taille de pierre et vitrail. La première cohorte officielle du programme en 2021-2022 couvrait deux spécialités, doit la taille de pierre et l’ébénisterie-menuiserie.
Avec plus de 270 heures de formations pratiques sur les techniques spécialisées dans un contexte de restauration de patrimoine, l’AEC en Métiers d’art du patrimoine bâti apparaît comme une des solutions à la pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans les interventions pour la sauvegarde de notre patrimoine collectif au Québec.
Légende : Les étudiants en visite à l’ancien hôpital Royal Victoria ainsi qu’à l’Église Saint-James de Montréal.
Le CMAQ tient à remercier sincèrement ses partenaires de projet la Société québécoise des infrastructures et le Centre universitaire de santé de McGill ainsi que le Centre de conservation du Québec et le ministère de la Culture et des Communications.
Poursuivre la découverte
- Pour une requalification exemplaire de l’ancien hôpital Royal Victoria. Héritage Montréal. En ligne. >
- Fiche Memento de la Villa Ravenscrag >
- Énoncé de l’intérêt patrimonial du Site de l’Institut Allan Memorial (ancienne villa Ravenscrag) par la Ville de Montréal >
- Consultation publique sur le site de l’ancien hôpital Royal Victoria >